le blues d'Akhushtal

A demi-allongée, appuyée contre un rocher, elle contemple le ballet des étoiles et Phobos. Akhushtal souffle.
Ses pensées s'éparpillent comme les fragments brisés d'un cristal. Elle n'arrive plus à se concentrer, comme bien souvent quand le calme revient. En même temps, il y a trop à faire, en trop peu de temps, sans échéances fixes, pas de buts visibles, pas de jalons dans cette course de fond.
Combien, comment, quand tourbillonnent dans son esprit. Il y en a tant et de tant de formes. Les derniers mois ont été fertiles en événements de toutes sortes. Et ceux à venir s'annoncent sous de biens sombres auspices. Elle devine les précipices.
Elle soupire profondément. Akhushtal souffle.
Elle devrait se réjouir de ce répit inespéré, en profiter. Tout comme de ces instants de bonheur, volés au temps, volés aux autres, arrachés à la grisaille qui les entoure. Au lieu de douter, de redouter le pire, de refuser d'y croire.
Elle refuse, en effet, de se laisser aller, laissant les doutes ronger ses pensées, ses sentiments.
Trop après si peu. Se retrouver noyée après avoir crever de soif, et que l'on espérait juste une averse légère...
Elle sourit. Un sourire dur, triste et amer.
Elle a trouvé. Trouvé ce qui la ronge, la perd en doutes infinis, sans cesse renouvelés.
Pour une fois, elle a des choses à perdre...
Les doigts se referment sur une poignée de sable dont elle laisse les grains s'envoler un par un au vent.
Akhushtal souffle.
Il faut parfois, savoir se laisser aller, s'abandonner au courant pour pouvoir mieux  se battre quand vient le moment.
Il faut accepter de recevoir pour pouvoir donner. Accepter d'avoir et de perdre, car sinon, il n'y a pas de combat, juste la défaite. Accepter de ne pas pouvoir tout contrôler.
Akhusthal souffle.
Et elle souffle aussi au creux de sa paume, laissant les derniers grains s'échapper.